Un regard croisé de François-Xavier Bouchart et Léon Claude Vénézia
De 1967 à 1977, deux jeunes photographes, François-Xavier Bouchart (1946-1993) et Léon Claude Vénézia (1941-2013) arpentent les rues du Paris populaire, principalement celles de ce que furent les villages de Belleville et de Ménilmontant. Ils documentent l’effervescence de la vie locale, le tissu urbain en pleine métamorphose où les immeubles, souvent insalubres, et les devantures colorées des commerces laisseront place aux tristes barres HLM.
Pour capturer ce qui allait disparaitre, ils choisissent principalement la couleur et l’utilisation de diapositives Kodachrome ou Ektachrome, là où les photographes humanistes privilégient le noir et blanc, à l’instar de Willy Ronis dont le travail sur ces quartiers fait partie de la mémoire collective. Faisant écho à La vie devant soi d’Ajar/Gary, ils s’intéressent aux enfants jouant dans la rue en toute liberté, aux cafés fréquentés par les ouvriers français et immigrés, aux cours intérieures, où les ménagères se côtoient en étendant le linge et les concierges veillent telles les vigies du quartier.
Conscients de la destruction prochaine d’une vie sociale si particulière à ces quartiers de l’Est parisien, où se mêlent toutes les origines et les confessions, François-Xavier Bouchart et Léon Claude Vénézia ont en commun de laisser un témoignage précieux.
Si François-Xavier Bouchart est attiré par l’architecture et le graphisme, Léon Claude Vénézia va plus naturellement à la rencontre des marginaux, sans oublier les graffitis, certainement l’influence de Brassaï dont il a été assistant-tireur. Tout comme les gamins dévalant les escaliers de la rue Vilin et le terrain vague des Envierges, les deux photographes ont fait des 19e et 20e arrondissements leur propre terrain de jeu.
260 tirages argentiques de Léon Claude Vénézia sont entrés dans les collections de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris (BHVP). En 2024 l’ensemble de l’œuvre de François-Xavier Bouchart a été donnée à la BHVP. Roger-Viollet assure la diffusion exclusive des photographies de ces deux auteurs.
Une exposition conçue par l'agence Roger-Viollet.
François-Xavier Bouchart arrive
à Paris en 1959. À treize ans, il reçoit en cadeau un appareil photo qui tout de suite le
fascine et réalise son premier reportage sur les ponts de Paris. En 1969, il est diplômé de l’École Nationale Supérieure des
Arts Appliqués et des Métiers d’Arts.
Il habite au 6 rue Rampal dans le
quartier de Belleville qu’il photographie, inquiet des destructions qui
menacent le tissu urbain original. À partir de 1971, il collabore à la réalisation
d’expositions pour le Centre Georges Pompidou. Lauréat de plusieurs prix de photographie, il participe dans les années 1980 à la conception d’un centre
d’histoire du nord-est parisien dans le Parc de la Villette : la Maison de la Villette, dans l’ancienne rotonde
des vétérinaires. À partir de 1987, après l’ouverture au public du bâtiment
restauré, il est responsable des expositions et de la constitution du fonds iconographique et de
la recherche d’archives. François-Xavier Bouchart a aussi fait partie de l’agence
Archipress (1990-1993), ses photographies ont été publiées dans de nombreux
magazines et ouvrages : Marcel Proust, la figure des pays (Colona,
1982), HLM (Albatros, 1983), En remontant Belleville (Créaphis,
2015), etc. Ses photos sont entrées dans les collections de la
Bibliothèque Nationale de France, du Musée Carnavalet et
de collectionneurs privés en France et aux USA. L’ensemble de son œuvre a été donné en 2024 à la
Bibliothèque historique de la Ville de Paris.
Né en 1941 à Paris dans le quartier de la Bastille,
Léon Claude Vénézia découvre très tôt sa passion pour la photographie
comme moyen d’expression. Il rencontre, durant sa formation les grands photographes de l’époque. C’est à la Bibliothèque Nationale, où il
assiste aux rétrospectives des œuvres d’André Kertérsz et d’Eugène Atget, qu’il
éprouve un véritable choc. Il réalisera ensuite les tirages de la première
biographie d’Atget par Jean Leroy. En 1968, il exécute ses premières photographies de
Belleville à la demande de l’écrivain Clément Lépidis. De 1968 à 1970 il est
assistant de Brassaï, avec lequel il se lie d’amitié et qui l’influencera
durant toute sa carrière. En 1974 il obtient sa première carte de presse. Devenu
indépendant, il effectue alors de multiples reportages commandés par de
nombreux magazines et journaux tels que La Vie, Le Monde, Libération et
bien d’autres. Les quartiers populaires ont été ses témoins d’aventures photographiques,
en particulier le quartier de Belleville avant sa « rénovation » brutale. Son
œuvre témoigne des grandes transformations architecturales
et sociétales de l’Est parisien et des quartiers populaires de Paris
et de sa petite couronne. Il réalise, entre 1976 et 2012, de nombreuses expositions
thématiques, dont Belleville (FNAC-Paris), ou Instants présents (Mairie du 11e , Paris). À partir de
1992 il enseigne la photographie à l’École Supérieure d’Art à Aix-en-Provence
pendant 10 ans.
En 2011, les Éditions Parimagine publient Le
Paris de Léon Claude Vénézia. L’œuvre foisonnante et singulière de ce passionné de
littérature et de cinéma rassemble environ 100000 tirages et négatifs
et de nombreux écrits. Ses archives sont représentées dans diverses collections
publiques, notamment la Bibliothèque historique de la Ville de Paris, qui
conserve environ 200 tirages argentiques, le Musée Nicéphore Niépce, la
Bibliothèque Nationale, la Documentation Française, la BPI du Centre Pompidou. Léon Claude Vénézia se situe, d’après la Bibliothèque
historique de la Ville de Paris, dans la lignée des « photographes des
métamorphoses de Paris, d’Atget aux photographes humanistes ».
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