Andromaque

La présence magistrale de Jean-Claude Drouot, rehaussée par un quintette instrumental porté par 4 comédiennes et un Pyrrhus saxophoniste.

Comment un vieux récit dont nous faisons encore mémoire est-il capable de toujours nous étonner et de nous donner à réfléchir ? C'est que, sous la plume du poète, il ressemble à ces graines enfermées pendant des millénaires dans les chambres des pyramides, et qui ont conservé jusqu'à aujourd'hui leur pouvoir germinatif...

Après des années de guerre, Troie est vaincue dans un terrifiant massacre et même le retour des héros tourne au désastre. La guerre finie, la nouvelle génération – fils et filles de parents légendaires, tous morts – est hantée par leur présence. Les Grecs, vainqueurs, ont fait prisonniers la veuve d'Hector, Andromaque, et son fils, Astyanax. En Épire, où tous deux sont gardés captifs chez le roi Pyrrhus, fils d'Achille, se noue un entrelacs de désirs à sens unique : Oreste, fils d'Agamemnon, aime Hermione, fille d'Hélène, qui aime Pyrrhus qui aime Andromaque qui aime Hector, qui est mort. Cet épilogue désenchanté invente un modèle : celui de la fameuse "chaîne racinienne".

En écrivant Andromaque, l'auteur ne tient pas un journal de guerre, ce sont d'autres combats qu'il livre. Car entendre Racine, c'est déchiffrer son propre coeur, ses opacités, et y laisser pénétrer la lumière qui guérit, humanise et spiritualise. Et c'est bien là le signe incontestable du grand poète.